Mon blog, cette dictature minuscule

nemoEnfant, lorsque je voulais m’opposer à ma grand-mère, en prétendant décider seul de certains projets, elle répliquait par cette sentence : « Gérard, à six ans, on est le chef de sa soupe, si on arrive avant l’chat! ».

Voici plus de deux mois que je suis installé aux commandes de ce blog, en tentant d’y produire régulièrement des contenus un peu travaillés. Il faut reconnaître que cette position offre des avantages que je n’avais pas soupçonnés en me lançant dans l’aventure.

Le premier et le plus important d’entre eux est celui d’y exercer un pouvoir sans partage, d’être à la fois pilote et aiguilleur du ciel, décidant  du contenu des articles, du rythme de leur production, de la mise en page, et du moment de leur publication. Je peux les corriger, les retravailler, les supprimer, sans avoir à en référer à quiconque.

Lorsque le temps s’y prête je pars en croisière dans la blogosphère et fais des rencontres étonnantes, parfois magnifiques. Il y a de vrais talents sur les blogs, des inventeurs, des créatifs, des poètes, des artistes, des communicants, des généreux plein d’humanité, de doux rêveurs, des utopistes. Il y a aussi des allumés, des ésotériques, des casques à boulons, des cyniques, des phraseurs. J’en oublie certainement. Chacun à bord de son embarcation m’envoie un petit salut lorsque nos routes se croisent. Plus qu’un monde, un univers s’offre à moi. Il m’arrive aussi d’atteindre les abysses et de déposer un commentaire critique sur des articles très polémiques au risque de recevoir des réponses lapidaires, parfois violentes. Même pas mal. Je repars alors, tel Némo à bord du Nautilus, mettant le cap vers d’autres continents, d’autres archipels.

Maître du virtuel je suis, empereur de mon nombril je reste. Un commentaire me déplais, je le supprime. Un intrus, un importun, un opposant pugnace, je l’expulse. Ici, pas de délibération, pas de vote, pas de démocratie.

Mais la solitude des grands fonds n’est pas toujours facile à vivre. On a besoin du regard de l’autre pour faire écho à sa propre existence, et sans évoquer la vanité, cette passion triste, qui impose des comportements peu glorieux, la quette de récompenses peut devenir insistante dans les débuts. Les premiers temps, il m’arrivait de flatter le blogueur, de le caresser dans le sens du poil avec des commentaires élogieux, pas toujours sincères, dans l’espoir d’obtenir en retour un compliment, ou Saint Graal des Saint Graal, un abonnement.

Après quelques semaines de tangage hésitant, je suis parvenu à naviguer en confiance,  profitant à loisir des meilleurs contenus et des centaines d’opportunités de rencontres qui se présentaient. Je commence seulement maintenant à me sentir à l’aise dans ce biotope. A l’affût des articles de mes auteurs favoris, je partage avec eux leurs impressions, leurs commentaires. Inutile de flagorner, de provoquer, de condamner, ou de jouer au plus malin. Il suffit de maintenir son cap dans le respect des autres, en restant curieux, attentif, bienveillant. Il y a encore beaucoup de place dans mon carnet d’adresses. La vie peut être belle sur le web.

Une réflexion sur “Mon blog, cette dictature minuscule”

  1. Les phrases de grand-mère sont toujours de merveilleuses trouvailles (j’en ai quelques-unes sous le coude, bien rangées, chipées à ma mémé) et pour le reste je suis assez d’accord. Longue vie à votre belle dictature!

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