Diviser pour mieux régner

Dans Kaputt, roman écrit par Curzio Malaparte de 1941 à 1943, Franck, Général gouverneur de Pologne sous l’occupation nazi, s’exprime ainsi au sujet du peuple polonais :

«J’en viens au prolétariat. Les paysans s’enrichissent par le marché noir : je les laisse s’enrichir. Pourquoi ? Parce que le marché noir saigne la bourgeoisie et affame le prolétariat industriel, empêchant ainsi la formation d’un front unique des ouvriers et des paysans… Je laisse les nobles se ruiner au jeu, les bourgeois conspirer, les paysans s’enrichir, les techniciens et les ouvriers travailler».

Se maintenir au pouvoir en opposant les classes sociales entre elles n’est pas chose nouvelle. De nos jours, la classe ouvrière en France est réduite à sa portion congrue pour cause de désindustrialisation ou de délocalisation. Elle n’intéresse plus personne et son poids électoral est limité. Les paysans, entièrement dépendant des subventions européennes, sont considérés comme des pollueurs criminels par les travailleurs du secteur tertiaire. Les jeunes, exclus du monde du travail, s’opposent aux vieux, assis sur leur tas d’or acquis pendants les trente glorieuses. Les gens du privé s’opposent à ceux de la fonction publique, les automobilistes aux piétons, les chasseurs aux écolos, et la gauche, exclue des arcanes du pouvoir financier s’oppose sans projet crédible à une droite cynique et toute puissante. Pendant ce temps, la classe dirigeante, les vrais riches, les cooptés, les initiés, les animateurs de réseaux, engrangent les dividendes et font du gras sur le dos des pauvres administrés qui croient encore qu’il faut consommer pour exister. Enfin, cerise sur le gâteau, le développement des réseaux sociaux, dit horizontaux, entretient l’espoir qu’une démocratie directe est possible. Que néni, dormez braves gens. Aux moment des vrais choix, les décisions empruntent toujours un chemin vertical.

Les leçons en plein air

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Malaparte – Kaputt

1942, la guerre sur le front russe – extrait

« La seule fois qu’il m’arriva d’assister à une de ces leçons, ce fut dans le kolkhoze d’un village près de Nemirowskoie.

Et, dorénavant, je refusai toujours d’assister à ces exercices de lecture. «Warum nicht ?,me disaient les officiers allemands du général von Schobert. Pourquoi ne voulez vous pas assister aux leçons en plein air? C’est une expérience très intéressante, sehr intéressant.» Continuer la lecture de Les leçons en plein air