Les métamorphoses du noir – naissance d’une couleur

Symbolisant l’obscurité des ténèbres, le noir a longtemps eu en occident une connotation négative. Léonard de Vinci, dans son traité de peinture le définit comme une privation totale de lumière. Les peintres renaissants comme Le Caravage, Rembrandt et plus tard Georges de La Tour l’utilisent dans des clair obscur très contrastés pour obtenir des effets saisissants dans une symbolique d’opposition entre le bien et le mal. Au service d’une peinture descriptive, le noir est utilisé pour définir les volumes et les masses.

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Le Caravage – la vocation de St Mathieu – vers 1600
A partir de la deuxième moitié du XIXème siècle le développement de la photographie entraîne une révolution sur l’objet même de la peinture. Il n’est plus de décrire, mais d’exprimer une vision du monde. La peinture se débarrasse progressivement des contraintes techniques nécessaires à l’imitation de la nature. En 1890 Maurice Denis nous rappelle « qu’un tableau, est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées. »

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Rembrandt – La parabole de l’homme riche – 1628

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Georges de Latour – St Joseph Charpentier – vers 1640
 N’étant plus liée à des impératifs de représentation de la nature, le noir devient une couleur à part entière. En 1946, Henri Matisse affirme « l’emploi du noir comme couleur au même titre que les autres couleurs: jaune, bleu ou rouge, n’est pas chose nouvelle. Les Orientaux se sont servis du noir comme couleur, notamment les Japonais dans les estampes. Plus prés de nous, d’un certain tableau de Manet il me revient que le veston de velours noir du jeune homme au chapeau de paille est d’un noir franc et de lumière. »

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Henri Matisse – Intérieur avec rideau Égyptien -1 948
Oasis où se repose la rétine (le noir stimule très peu les cellules sensorielles réceptives aux stimulations lumineuses), le noir se comporte comme une surface de transition permettant de rebondir d’une couleur à une autre en participant au rythme de la composition. Ainsi, comme dans un orchestre où le triangle serait promu au rang de premier violon, le noir est invité à jouer une partition d’importance dans la peinture moderne.

Plus prés de nous, et toujours influencés par la peinture orientale, les peintres utilisent le noir sous forme de tache, porteuse d’énergie, dans des compositions monumentales.

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Frantz Klein

 

 

 

 

 

Pour Pierre Soulage elle devient porteuse de lumière, avec sa vibration propre.

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Pierre Soulage – 2012
Ainsi, le noir est sorti des ténèbres pour devenir lumière.

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